Pouvez-vous nous parler de votre parcours professionnel ?
Je suis issue du milieu des RH puisque j’ai été à la direction d’établissement pendant une dizaine d’années en tant que responsable RH dans le secteur de la distribution, du transport et de la logistique. C’est un milieu essentiellement masculin donc très formateur pour une femme. Il faut réussir à prendre sa place !
Cette expérience m’a beaucoup inspirée pour la création de mon entreprise.
En effet, j’avais, au-delà des sujets qui incombe à une RH (relations sociales, développement des compétences, santé au travail), la responsabilité de la mise en œuvre de la politique diversité au sein de mes établissements.
Il est vrai que malgré une volonté forte de la direction des entreprises, il y avait beaucoup de réticences chez certains managers ou collègues de travail à intégrer ou à maintenir en emploi des personnes en situation de handicap. Moi-même, en tant que Responsable RH, j’étais parfois démunie fasse à certaines situations, par manque de connaissances des solutions existantes.
La réflexion s’est donc posée créer une entreprise autour de la question du handicap en entreprise.
Toutefois, j’étais une experte RH mais pas une cheffe d’entreprise, j’ai donc décidé en accord avec mon employeur, de faire une formation à l’ESSEC sur l’entrepreneuriat. L’objectif était de me donner toutes les bases au pilotage d’une entreprise. Au terme de la formation qui a duré un an, j’ai lancé la création de mon entreprise :  Yumaincap
Yumaincap est une entreprise solidaire d’utilité sociale de par son statut d’entreprise adaptée. L’entreprise adaptée est une entreprise agréée par les services de l’Etat DREETS qui prend l’engagement de recruter majoritairement des personnes en situation de handicap et de les accompagner d’un point de vue socio-professionnel.
A date, 5 de nos talents sur 7 sont en situation de handicap chez Yumaincap.

Notre mission est double :

  • Accompagner les entreprises à piloter efficacement leur ressources humaines. Nous proposons ainsi un service RH externalisé, partagé et adapté ;
  • Accompagner les entreprises à renforcer leur politique handicap par le recrutement, la sensibilisation, la formation et l’accompagnement des salariés 

Nous montrons ainsi à nos partenaires qu’une entreprise peut être performante, efficace et économiquement viable, tout en ayant un engagement fort par la diversité de notre équipe.

 

Une des difficultés peut être la méconnaissance ou la crainte de certains interlocuteurs sur le caractère social du projet.
C’était quelque chose d’assez nouveau dans le milieu des RH et il a fallu réussir à convaincre nos interlocuteurs que le projet était viable et réfléchi.
Pour ce qui est du côté finance, pas de difficultés car les banques étaient favorables à me prêter les fonds ainsi que le Réseau Entreprendre et France active.

 

La réticence financière était plutôt de mon côté à l’idée de faire un emprunt  
Après avoir obtenu le prêt Réseau Entreprendre, je n’ai jamais sollicité de prêt bancaire.
J’ai toujours été réticente au prêt et en début d’activité c’est une prise de risque que je n’ai pas voulu prendre. Je me suis dit « tu as le prêt Réseau Entreprendre, limite-toi à ce prêt-là, on ne sait jamais ».
Dans cette phase de démarrage et n’ayant pas de visibilité, je voulais au maximum préserver mon entourage en cas d’échec et donc ne pas m’engager sur des prêts trop conséquents.

 

Le fait que je me sois lancée seule sur le projet,
Les interlocuteurs ont de la réticence quand vous êtes seule à bord. Ils vous disent « Comment elle va gérer une boite en étant seule associée, est ce qu’elle se sent capable de le faire ? » ou encore « quand allez-vous vous associer ?»
Or, de mon côté, je n’avais pas forcément envie de m’associer. Donc il fallait justifier ma capacité à mener le projet à fond en étant maman de 3 enfants.
J’ai toujours su allier ma vie de famille à ma vie professionnelle
Le projet Yumaincap est aussi un projet de famille, avec un soutien sans faille de mon mari, mes enfants, mes parents ce qui permet d’avancer sereinement.

Les avez-vous totalement ou partiellement levés ?
J’ai encore des investissements à faire, mais je les autofinance, je ne fais toujours pas de prêt.
J’ai bien conscience que ces prêts peuvent m’apporter un coup d’accélérateur et me permettre d’aller plus vite mais « non pour le moment ».

 

Quels moyens avez-vous mis en place pour lever ces freins ? 
Je ne cherche pas nécessairement à lever le frein car cela fait partie de ma philosophie.
Je sollicite d’autres sources de financement pour me permettre d’avancer (subvention, love money).

 

Vous êtes lauréates Réseau Entreprendre Essonne, qu’est-ce que l’association vous a apporté ?  
Déjà l’association, au moment de ma candidature m’a donnée confiance et m’a aidée à être plus ambitieuse pour le projet.
Dès le dépôt de ma candidature on m’a dit « tu peux aller plus loin parce qu’il y a du potentiel sur ton projet. » On m’a donné confiance pour être plus ambitieuse sur mes projections notamment du fait de l’innovation sociale de l’offre.
Ensuite, le fait de ne pas rester seule d’avoir un mentor avec qui je pouvais partager était essentiel.
Il me challengeait pour me faire voir les choses que je ne voulais pas regarder, me faire sortir de ma zone de confort et m’aider à prendre du recul.
Enfin les clubs étaient la bouffée d’oxygène du mois pour échanger en toute transparence avec ses pairs, partager ses joies, ses inquiétudes et ses ambitions.

 

Quels sont les obstacles auxquels vous devez encore faire face pour la poursuite de votre projet entrepreneurial ? Comment les surmontez-vous ?
J’ai de nombreux projets en tête mais le fait d’être seule à tendance à ralentir mes ambitions.
Cela m’amène à me poser la question de m’associer. « Seule on va vite à plusieurs on va plus loin ! »

 

Si vous deviez donner 3 conseils à une future cheffe d’entreprise pour l’aider à se lancer et oser l’entrepreneuriat, que vous lui donneriez-vous ?
Conseil n° 1
Ne pas rester isolée donc se rapprocher d’associations comme le Réseau Entreprendre mais d’autres institutions comme la chambre de commerce, les fédérations patronales ou tous réseaux qui permet de rencontrer du monde, échanger et créer des synergies.

Conseil n°2 Se faire confiance et ne pas avoir peur d’être ambitieuse : « au fond de nous on espère beaucoup mais on se dit non c’est trop ». Il faut faire confiance à ses projections et ses choix.

Conseil n°3 Ne pas avoir peur de l’échec, en fait c’est souvent la peur de l’échec qui empêche d’avancer. Ne pas avoir peur et y aller.