Après des études de droit et de commerce, le destin de Nathalie Humbert a pris un tout autre tournant au décès de son père, lorsqu’elle s’est naturellement retrouvée propulsée à la direction générale du groupe de sociétés familiales, spécialisé dans l’exploitation et la vente de lavomatiques à Paris. Juriste de l’AFL, Association Française des Laveries – Syndicat Professionnel, Nathalie est également très engagée dans le milieu associatif où elle a cofondé Casiopeea, Le sport pour vaincre et Les trois pommes. Partager, échanger et être au service des autres sont des moteurs qui la guident dans ses différents engagements au quotidien. Elle nous raconte…

Rejoindre un groupe de sociétés familiales, comment en es-tu arrivée là ?

Lorsque mon père nous a quitté brutalement en 2001, il n’avait pas prévu sa succession et je me suis donc retrouvée 100% impliquée dans ces entreprises familiales. Je travaillais déjà pour le groupe à cette époque mais je menais d’autres projets en parallèle aussi, partageant ma vie entre Paris et la Normandie. À l’origine, je me destinais à être avocate et souhaitais prolonger mes études, puis la vie en a voulu autrement. Je suis donc associée avec mes deux frères. L’association entre frère et sœur n’est que rarement simple et si notre relation se traduit par une « entente de raison », nous restons soudés malgré tout.  

Que conseilles-tu dans ce type de situation, afin que cela se passe le mieux possible ?

Les problèmes d’entente entre les associés font partie des choses difficiles, qu’on le veuille ou non. Il faut toujours avoir un bon mentor, une personne qui agit en tant que médiateur. Je trouve que c’est un sujet très intéressant. De plus en plus de personnes se forment à la médiation d’entreprise, source de nombreux bénéfices – que je recommande systématiquement. Quand il y a un changement de gouvernance ou une mauvaise gouvernance dans une entreprise, familiale ou autre, il faut avoir l’humilité, la modestie et le courage de demander une aide extérieure.

Tu évoquais la transmission, comment l’anticipes-tu ?

Je partirais apaisée si tous mes salariés sont conservés. C’est d’ailleurs un point sur lequel nous sommes tout à fait d’accord avec mes frères. Nous sommes quatorze salariés à temps plein et trente avec les temps partiels. Certains sont là depuis plus de 20 ans, ont des salaires élevés et des avantages que l’on ne pourrait plus offrir aujourd’hui. À savoir, tous nos salariés, venant de milieux différents sont logés à Paris. Le bien-être de nos employés s’inscrit dans l’ADN de nos entreprises.

Cette culture singulière est quelque chose auquel nous tenons particulièrement. Transmis par notre père, elle participe à la longévité de l’entreprise. Nous sommes une vraie famille, un peu à l’ancienne. Nos bureaux sont d’anciens ateliers situés dans le 15e et nous ne sommes pas du tout axé « digital ». Malgré mes tentatives, les salariés refusent d’en entendre parler !

Casiopeea, Le sport pour vaincre, késako ?

Quand j’étais malade, je me suis aperçue que j’avais beaucoup de chance d’avoir accès à des soins, d’avoir une mutuelle et une perruque digne de ce nom. J’avais la chance d’avoir un mari, des amis, un travail, et même un mauvais caractère ! Une fois soignée de mon cancer, l’intuition d’être utile et de toucher des gens qui n’avaient pas accès aux mêmes choses que moi a germée. Transmettre ce que la maladie m’avais appris, notamment à travers le sport était un désir profond. Même s’il ne guérit pas, le sport permet de mieux vivre la maladie. 

Un ami m’a alors présenté Nathalie David, avec qui j’ai co-fondé Cassiopeea Le sport pour vaincre. Nous sommes des femmes très différentes. Elle est aussi sportive que je ne le suis pas. Elle monte de gros projets autant que j’adore brasser de l’air ! Très complémentaires, nous avons décidé d’avancer ensemble et de démarrer l’aventure. La magie d’une association est la complémentarité des personnalités qui la composent. Casiopeea Le sport pour vaincre est aujourd’hui une association de 70 adhérents qui aide principalement des femmes qui ont ou ont eu des cancers. Nous sommes très fières de cette réussite collégiale qui bénéficie d’un très bon rayonnement aujourd’hui.  Nous sommes cinq au bureau et allons bientôt changer de gouvernance. Quels qu’ils soient, il faut qu’il y ait des changements dans la gouvernance. Pour donner envie d’avoir envie, il faut que cela bouge.

À Casiopeea Le sport pour vaincre, nous proposons un atelier par mois pour que nos adhérents puissent pratiquer du sport. Cela peut par exemple être une course à pied ou à vélo, qui va être prise en charge de A à Z par l’association. D’ailleurs, la prochaine que nous organisons est l’Ultra Marin où nous habillons intégralement ceux qui s’engagent avec des vêtements techniques de qualité, qui participent au bien-être de la personne. Notre association est portée majoritairement par des sponsors et mécènes , le Haut patronage du Ministère des Sports.

Qu’est ce qui te pousses à t’investir dans des associations comme celle-ci ?

C’est de partager ! De me sentir utile, de rendre à d’autres ce que j’ai reçu. Quand j’étais petite, je disais toujours à mes parents que j’étais communiste capitaliste, c’est vraiment ça. On peut donner un peu de son temps, un peu de sa personne mais ce que l’on reçoit en retour est bien plus grand. J’ai toujours été très engagée de toute façon. Je fais des manifestations, j’adore ça.

J’ai d’ailleurs rejoint une autre association qui cartonne et qui est créatrice d’emplois en Normandie : Les Trois Pommes, avec laquelle nous faisons du jus de pomme pour nos adhérents qui arrivent avec leurs pommes au pressoir et repartent avec des bouteilles. Cette aventure collégiale avec la mairie est un bel exemple de réussite associative. C’est d’ailleurs la maire de mon village à Epaignes qui est à l’origine de ce projet. C’est une telle réussite que nous sommes devenus la 41ème SCIC de France, une sorte de coopérative améliorée. La pomme est un produit extraordinaire qui ne finit jamais de nous surprendre. On s’est également aperçus qu’avec le marc de pommes, on pouvait faire de la « farine » de pomme, la Faripomme. On a donc lancé une production de farine il y a 2 ans qui marche très bien. Je vis plein de belles rencontres, très différentes et passionnantes !

Et pour finir, pourquoi le Réseau Entreprendre ?

Le Réseau est également une jolie rencontre. Après ma maladie, j’ai suivi une formation sur la gouvernance à Sciences Po et Isabelle Georges, une lauréate de Réseau Entreprendre – que j’ai rencontré dans ma promo, m’a conseillé de m’y intéresser. En effet, j’avais envie de comprendre le monde dans lequel vivent nos enfants et aimant partager et transmettre, j’ai intégré le Réseau. L’accueil très chaleureux des membres donne envie de s’impliquer. Administratrice depuis 2 ans, pleins de belles choses émanent de cette communauté engagée et cela permet d’aller de l’avant. Partager est une vraie force et apporte énormément !